Les acquis sociaux dont nous sommes si fiers – comme le suffrage universel, les soins de santé, les congés annuels, l’aide en cas de maladie ou de chômage, des conditions de vie au travail correctes – sont le résultat de luttes sociales acharnées, dans lesquelles les syndicats ont pris l’initiative de donner une voix aux opprimés dans la société.

Quand les décideurs politiques plaident pour une révision du droit de grève – universellement reconnu dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 adoptée en opposition à l’idéologie fasciste qui avait plongé le monde dans la guerre – cela signifie tout simplement qu’ils veulent le supprimer.  Le ‘droit de travailler’ est un droit inexistant.

Petit rappel des conquêtes par la grève
Si la grève peut porter préjudice à l’économie, une étude sur le long terme démontre qu’elle a aussi des avantages et que souvent par le passé, elle a donné des résultats qui ont changé nos vies, reconnaît l’historienne Gita Deneckere.greve Si on regarde en effet les conquêtes sociales obtenues depuis un siècle, on constate qu’il a fallu les arracher et que pour ce faire, manifestations et grèves y ont puissamment aidé.

Grâce aux grèves, tout le monde bénéficie de certains droits. Petit rappel…Le suffrage universel
Avant 1919, le Parlement « élu démocratiquement » ne représentait que la bourgeoisie et l’aristocratie. Grâce aux campagnes du Parti Ouvrier Belge et de la Commission syndicale (ancêtre de la FGTB) assorties de grèves (1893, 1902, 1913) et de manifestations sous le slogan « UN HOMME UNE VOIX », nous en serions encore au suffrage censitaire ou au vote plural (plusieurs voix pour les plus riches).Indexation des salaires
L’entrée des syndicalistes au Parlement dès le premier scrutin au suffrage universel en 1919, permettra de renforcer la législation sociale. C’est à partir de là que l’on introduira les premières formes d’indexation des salaires.

Journée de 8 heures
Nous avons bénéficié de la journée des 8 heures dès 1921. Avant cela, les journées de travail pouvaient s’étirer jusqu’à 12 heures et la semaine comptait 6 jours de travail.

Congés payés
Les grèves de 1936 ont permis d’engranger la première semaine de congés payés. Au fil du temps, cette semaine sera allongée pour donner aujourd’hui droit à 20 jours. C’est aux grèves que l’on doit nos vacances annuelles payées.

Réduction de l’écart salarial entre hommes et femmes
Même si l’égalité salariale entre hommes et femmes n’est pas encore atteinte, elle est en marche et l’écart salarial horaire s’est considérablement réduit. Cette progression on la doit à la grève de 12 semaines de 1966 des femmes de la FN Herstal pour l’égalité salariale.

Liaison des allocations sociales au bien-être
Suite aux manifestations de 2003 et celles de 2005 contre le Pacte des générations, nous avons obtenu la liaison des allocations sociales au bien-être qui a permis de stopper le décrochage des allocations sociales par rapport à l’évolution des salaires.

Droit de travailler ou droit au travail?
Le droit de grève ne peut entraver le droit de travailler”, c’est ce que l’on entend après chaque action syndicale. Mais d’où vient cette notion de ‘droit de travailler’ ? Existe-t-elle vraiment ?
La Déclaration universelle des Droits de l’Homme parlent du droit d’avoir un travail, du droit à la sécurité d’existence, du droit d’avoir une vie digne. Il n’y est pas question du droit d’un travailleur d’arriver au travail le matin sans entraves. Le ‘droit de travailler’, dans le sens d’arriver au travail, dont les décideurs politiques parlent tant ces derniers temps, n’a aucune base juridique. On peut donc dire que la notion de ‘droit de travailler’ n’a pas d’existence légale.
Il en va tout autrement du droit de grève qui est reconnu par les traités internationaux.

Le droit de grève universellement reconnu
Les bases juridiques du droit de grève sont essentiellement internationales. On le retrouve dans l’article 23 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 adoptée en opposition à l’idéologie fasciste qui avait plongé le monde dans la guerre.
On le retrouve dans l’article 8 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966. Et encore dans l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme. Dans l’article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Et enfin encore dans les convention n° 87 et 98 de l’Organisation internationale du travail.

Une grève sans perturbations n’est pas une grève
S’il existait un droit permettant aux travailleurs d’aller travailler sans la moindre perturbation pendant une grève, le droit de grève – qui est un droit fondamental – serait tout simplement supprimé dans les faits. Le fait de mobiliser les intérimaires pour briser une grève et poursuivre malgré tout – malgré les préoccupations légitimes des travailleurs fixes – la production, aurait le même effet.
Ceci remet le droit de grève dans son intégralité en question, car une grève sans impact économique n’est pas une grève. La grève est en effet une des rares armes du collectif. Le pouvoir du nombre donne aux travailleurs une position de négociation plus forte par rapport au patronat et est essentiel pour le progrès social.

La discussion sur le droit de grève et le ‘droit de travailler’ resurgit régulièrement, généralement après une action syndicale. Plutôt que de tenter de museler les syndicats et d’enlever aux citoyens leurs droits fondamentaux, le gouvernement devrait s’occuper des véritables droits théoriquement inscrits dans la Constitution belge dont le droit au travail. Ce droit fondamental signifie que tous les habitants de ce pays doivent avoir un emploi à même de leur permettre de mener une vie digne. Cela signifie aussi que nos pouvoirs publics n’ont pas fait leur « travail » pour les centaines de milliers de chômeurs que compte la Belgique.

 

DOSSIER FGTB